Journal #001 : Discipline domestique ?

Hello 🙂

J’inaugure une petite série hebdomadaire en parallèle avec l’autre récit.
Il y a une forte demande pour que je parle de discipline domestique, entendez par là que je décrive ce qui n’est pas un loisir mais un mode de vie. La notion même de couple BDSM semble faire fantasmer pas mal de monde. Vivre avec une dominatrice, vous imaginez ? Tout un programme !
J’ai repoussé ce thème pendant longtemps pour plein de raisons, notamment parce qu’il va m’obliger à m’exposer sous un angle plus personnel et que j’ai peur du jugement négatif que je pourrais recevoir. Vous pouvez rigoler « je ne suis qu’une petite chose fragile » en fin de compte.
J’ai également peur qu’il remporte moins de succès. Il faut comprendre que comparé à l’intensité d’une séance la réalité quotidienne d’une vie de couple est banale et ce quel que soit votre choix de vie, même si vous la pimentez d’un soupçon de BDSM elle restera routinière. Ce n’est pas un mal puisqu’elle a aussi pour vocation d’être un refuge, un élément stable qui nous rassure.
J’aime ma vie cependant je dois reconnaitre qu’elle n’a rien d’exceptionnelle et je crains que certains de mes lecteurs placent en moi trop d’espoir.
Quoi qu’il en soit c’est avec un peu de fierté et beaucoup d’audace que je me lance dans ce projet fou. J’aime les défis et je ne suis pas celles qui se laissent décourager par le premier obstacle. L’immobilité parait rassurante mais n’apporte jamais rien de bon, il faut savoir prendre des risques de temps en temps.

J’hésite encore sur le format. Il sera forcément plus court que l’autre pour des questions de rythme de production, j’ai un « vrai » métier à côté pour payer les factures à la fin du mois et il est prenant. Si je veux mener de front 2 publications par semaine je dois me ménager. J’ai fait le choix de ne pas monétiser mes écrits et je dois en assumer les conséquences, enfin c’est surtout vous qui restez frustrés …
Mon idée de départ est d’alterner entre théorie et pratique. Par exemple je commencerais cette semaine en parlant des fondations de notre mode de vie avant d’enchainer la semaine prochaine avec les préparatifs pour Halloween. J’hésite encore à vous faire un post récapitulatif des activités de la semaine ou vous en faire un compte-rendu jour après jour en quelques lignes à chaque fois.
Je n’ai rien arrêté définitivement et la formule pourrait aussi évoluer en fonction de mes envies et de vos retours.

Quoi qu’il en soit commençons donc par les bases, la définition du sujet. Qu’est-ce que la discipline domestique (ou conjugale )?
Déjà il faut éliminer d’entrée ce qu’elle n’est pas. Ce terme ne fait pas référence à un couple ayant des relations BDSM à titre récréatif, autrement dit un couple jouant seulement de manière épisodique à des scénarios pour pimenter leur vie sexuelle. Certains sont soumis pendant les séances et dominants le reste du temps, toutes les sensibilités sont dans la nature et pour certains le BDSM est une échappatoire, une inversion temporaire des rôles. D’ailleurs au sens large pas mal de couple se permettent de petites fessées quelques fois dans l’année, une claque sur les fesses pendant l’acte ou de petites fantaisies.
Ni voyez pas un mépris de ma part je ne fais que déterminer mon sujet pour éviter les malentendus.
Le BDSM au quotidien repose sur d’autres fondements et ils sont d’ailleurs souvent mal compris. À première vue cela semble compliqué ou extrême, les soumis s’imaginent qu’ils vont passer leur temps à ramper sur le sol, le dos marqué en permanence par les fréquentes corrections. Comment réussir à déployer assez de volonté pour subir un tel traitement jour après jour sans craquer ?
Si un problème vous semble impossible à résoudre c’est qu’il est mal posé.
Les séances sont des concentrés de BDSM destinés à faire frissonner, à jouer avec des fantasmes à un rythme soutenu et il n’est pas possible de maintenir cette intensité sur la longueur. J’oserais même aller jusqu’à dire qu’il est plus difficile de subir une de mes séances que de vivre avec moi.
Bien sûr je fantasme aussi sur une forme d’esclavage à vie mais je suis réaliste cela n’arrivera jamais. Une soumission extrême 24/7 est un fantasme qui ne peut être réalisé. En introduction je vous faisais part de ma crainte que cette série vous soit décevante, vous comprenez maintenant pourquoi.

Mon couple ne diffère des autres que sur quelques détails, ce n’est pas flagrant. Bien sûr il y a aussi de sérieuses mises au point. Lorsque je lui donne à faire une liste de courses et qu’il revient en ayant oublié plusieurs choses il doit s’attendre à de sévères représailles. Par moment je suis dure, je le reconnais, mais globalement la vie d’un couple appliquant une discipline conjugale est bien plus douce que ce dont vous pouvez vous attendre. Cela ne veut pas non plus dire que nous ne la pimentons pas en allant plus loin en faisant de vraies séances.
J’insiste sur ce principe car si en apparence cela semble être un fantasme les ressorts sont complètement différents. Là où une séance cherche l’excitation et le plaisir (même via sa privation) donc a un aspect fortement sexuel, la discipline domestique propose un autre modèle de répartition des pouvoirs dans le couple. Le but est différent, il s’agit de trouver un autre schéma de réponse aux épreuves de la vie. Mon homme est davantage un éternel enfant ayant abandonné à sa compagne le droit de prendre les décisions importantes qu’un soumis.
Concrètement nous avons mis en place des règles et des objectifs de comportement. J’ai bien dit « nous », ce processus s’est fait à deux. Une fois que nous avons eu notre destination ça a été à moi d’entrer en scène pour faire respecter le plan en usant de punitions, de privations et de permissions spéciales. Je suis comme une coach amenant mon homme à se dépasser. En l’espèce son objectif principal est d’être le mari parfait et il m’a fait lui promettre de ne rien lui laisser passer jusqu’à ce que cela soit devenu une seconde nature chez lui. Nous ne sommes pas opposés mais alliés, je le punis certes mais c’est le rôle qui m’a été attribué d’un commun accord. Nous sommes fondamentalement complices et dans la même galère.
Je ne suis pas là pour lui crier dessus, il est là pour ne pas me fournir l’opportunité de le faire. Je ne lui impose pas des supplices pour le punir mais pour lui fournir l’occasion de briller. La récompense résidant dans le dépassement de soi et non pas dans l’échec. Un mari soumis est comme un sportif qui souffre pour se dépasser et qui n’est heureux qu’une fois l’épreuve réussie, une fois qu’il est sur le podium.
Il faut bien comprendre ce point, il ne cherche pas à se faire punir contrairement à un soumis de séance.
Un point essentiel pour comprendre le sujet est de faire la séparation entre fessée érotique et celle qui est punitive, vraiment punitive. Le but de la discipline domestique est d’imposer les bons comportements pas d’encourager à faire des bêtises pour s’amuser derrière, ce ne serait pas sain. La punition doit avoir un vrai côté dissuasif. Il peut d’ailleurs sembler bizarre que j’utilise une pratique aussi soft que la fessée à la brosse à cheveux pour assurer la discipline alors que j’inflige à des soumis bien pire lors des séances. Il m’arrive à l’occasion de passer sur une ceinture et je sais que Candice utilise un combo martinet/cravache mais toujours dans des proportions moindres que lors des séances. La discipline n’implique pas une débauche de moyens, elle est au contraire nette et précise.
Si j’ai fait le choix de la brosse c’est déjà parce qu’une telle fessée n’a jamais tué personne et que je peux donc en abuser. Je me suis déjà montrée sévère à des points que vous n’imaginez pas. La pratique a beau être simple elle me permet de cuire ses fesses si j’en ai besoin. J’ai d’autant moins d’hésitation à avoir que les fesses sont une partie cachée du corps, à part moi personne n’est censé les voir. Je n’ai pas envie que mon homme arrive au boulot tous les jours le visage tuméfié, par contre qu’il grimace à chaque fois qu’il s’assoie ne me dérange pas. Je ne cherche pas à l’humilier publiquement si je n’y suis pas forcée, la discipline est un problème de couple et doit rester entre nous. Lorsqu’il se comporte mal en soirée il a droit à un premier avertissement. S’il persiste je lui annonce à l’oreille qu’il recevra une fessée en rentrant puis, s’il ne s’est toujours pas calmé, la fessée publique tombe au troisième rappel à l’ordre. Je n’estime pas être dure avec lui mais il ne doit jamais oublier que j’ai presque toujours ma brosse à cheveux dans mon sac à main pour le discipliner sur l’instant si besoin. Ce n’est pas qu’une menace en l’air, je suis déjà passée à l’acte. Par exemple il est assez mauvais conducteur, je devrais dire « était », après quelques déculottées sur le bord des routes et sur les aires de repos mais il est désormais bien plus attentif au code de la route.
Je vous assure que sous leur apparente simplicité les fessées à la brosse à cheveux sont terriblement efficaces pour éduquer les vilains garçons récalcitrants.

Une seconde confusion fréquente est de croire que la discipline conjugale repose sur la croyance en un sexe supérieur. Ce n’est pas la réalité, l’envie de soumission se colle par-dessus l’envie de discipline, elle n’est pas lié au fantasme de domination par les femmes mais bien à l’envie de se dépasser pour l’autre. L’état d’esprit est de se dire que l’autre mérite que j’essaye d’améliorer sa vie jour après jour et non pas de le considérer comme un acquis. Il s’agit de reconnaitre que l’autre est mieux placé pour prendre les décisions ou tout simplement qu’il s’épanouit davantage en donneur d’ordre. Un mari soumis l’est envers sa femme, pas envers les femmes en général. En tout cas ce n’est pas nécessaire. Je connais des couples où la femme est soumise et cela ne me pose pas de problèmes, si elles s’épanouissent dans une vision traditionaliste de la famille je ne vais pas les blâmer. Lors des diners entre couples « du milieu » je me sens davantage proche des hommes dominants que des femmes, nous discutons entre nous puisque nous partageons les mêmes centres d’intérêt et mon homme va avec les femmes soumises pour parler cuisine et chiffons. Le sexe ne rentre pas en ligne de compte. Il n’est pas question de supériorité ou d’infériorité sexuelle mais de répartition consentie du pouvoir au profit de l’un qui a la lourde tâche de diriger le couple et qui gagne davantage de liberté en contrepartie. L’égalité des pouvoirs au sein des couples est bien sauf quand elle est subie.
D’ailleurs plus original je connais des couples qui changent de rôle chaque semaine. Le concept est intéressant, pendant une semaine l’autre est à disposition et vice-versa celle d’après. Rien que du point de vue sexuel cela leur permet de disposer du corps de l’autre pour expérimenter certains fantasmes sans se priver. Ils sont souvent adorables à regarder, se cherchant réciproquement. Je me souviens d’un diner où le mari, alors en place dominante, avait subitement interdit à sa femme de parler pour le reste de la soirée. Elle lui avait lancé un regard semblant dire « la semaine prochaine je te fais ta fête » et il avait répondu sans un mot dans un sourire indiquant « oui mais cette semaine c’est moi qui te la fait ». Cette complicité était vraiment trop mignonne.
Ce type de relation n’est pas faite pour moi mais je reconnais que c’est une forme originale de vie de couple. Personnellement, même si je n’ai rien contre une bonne grosse déculottée quand je fais une bêtise, j’estime que ce genre de punition doit être humiliante pour être efficace et je ne peux pas me résigner à laisser mon homme me dégrader. Ce qui est partagé puisqu’il aime me savoir intouchable, il veut que je sois une déesse. C’est en quelque sorte ma part du contrat. Je ne dois pas agir vulgairement, je me fais belle même le week-end. Il adore ce que je porte pour aller travailler, rien qu’un jeans et un blazer ou une veste de costume suffit à l’émoustiller. Je ne parle même pas de son état lorsque je porte une jupe droite noire, des collants et des talons. Il aime les figures d’autorité et je dois tout faire pour en être une.
Ce n’est pas facile, c’est parfois douloureux, je ne vais pas mentir porter des escarpins toute la journée n’est pas chose aisée mais j’ai ma contrepartie. Lorsque je rentre du boulot je n’ai qu’à m’asseoir sur le canapé pour regarder la télé et il se précipite pour me faire un soin des pieds. Se faire masser après avoir souffert est un plaisir divin.
Si le prix à payer pour avoir un homme aussi serviable est de lui mettre une fessée de temps en temps je trouve que ce n’est pas cher payé.
J’en rajoute, il n’est pas si facile de punir celui que l’on aime bien au contraire. Encore une fois je rappelle que les fessées sont punitives et je ne m’arrête pas aux premières larmes. Je dois me persuader que c’est pour notre bien à tout les deux et être stricte. Je suppose que c’est comme avec un enfant lorsqu’il faut le gronder pour lui faire prendre de bonnes habitudes, pour qu’il comprenne qu’il y a un temps pour jouer et un temps pour étudier.

Je posterai la suite la semaine prochaine. Ce week-end vous aurez l’autre publication habituelle.

La suite par ici

Dressage d’un débutant #3 : préparation

Sommaire

Après quelques minutes je m’étais enfin calmée, je reprenais le dessus sur mes émotions. Pour me changer les idées j’essayais différentes tenues, je devrais plutôt dire que je violais mon dressing pour être plus honnête vu le champ de bataille qui en résultait sur mon lit. C’est l’éternelle question matinale : qui vais-je être aujourd’hui ? Ne vous méprenez pas, je suis fière de ce que je suis, de mes différences, de mes spécificités. Je n’essaye pas de me cacher, simplement j’ai plusieurs personnes dans ma tête et selon les jours l’une prédomine sur l’autre. J’allais rencontrer pour la première fois un nouveau soumis potentiel, il fallait que je fasse forte impression dès les premières secondes. À ce moment-là je portais une robe blanche à motifs imprimés noirs. Le haut en cœur croisé, une ceinture foncée assortie et la jupe flottante jusqu’aux genoux. Très loin de la vision de la dominatrice à demie-nue en cuir et latex. Très girl next door, c’est mon style, J’aime ancrer ma domination dans le quotidien, comme si elle était ordinaire ou banale. Après tout 3 à 6 % de la population est sadomasochiste (selon que l’on adopte une définition plus ou moins restrictive), ce n’est pas exceptionnel. A chaque fois que je suis dans un amphi à la fac j’essaye de deviner qui penche du même bord que moi, parmi les centaines de personnes il doit bien y en avoir une poignée. Désolé pour les clichés mais je ne suis pas une dominatrice frustrée et agressive. De qui je me moque, à ce moment-là j’étais complètement frustrée et agressive vu ce que je venais de faire mais je n’en étais pas fière et ce n’était pas mon état normal. Je ne hais pas fondamentalement les hommes, j’aime juste les pousser à bout, c’est marrant. Contrairement aux apparences je ne passe pas mon temps à leur hurler dessus pour un rien, d’ailleurs c’est mauvais pour les rides de crier. Un petit jeu sadique est souvent plus efficace qu’un cri pour rectifier un comportement et c’est tellement plus amusant. J’aime jouer les jeunes filles espiègles, les pestes. Je mets un point d’honneur à être ferme, exigeante, intransigeante, sévère tout ce que vous voulez mais surtout pas injuste. Il ne faudrait pas s’arrêter à une vision extérieure, si je punis ou insulte un soumis cela ne veut pas dire que je n’ai pas de respect pour lui, juste que cela fait partie du jeu. C’est une forme d’amour vache qu’il est parfois dur d’appréhender. Il est vrai que ce n’est pas tout le monde qui est capable de quitter son petit confort bourgeois pour aborder des pratiques plus intenses. Peu de gens osent s’éloigner de la normalité pour vivre des expériences plus violentes. C’est pourtant salutaire pour décharger tout ce que nous pouvons intérioriser dans notre vie sociale quotidienne. Le BDSM est excessif par nature, c’est ça qui est bon. Pour en revenir à ma robe, une tenue plus ordinaire permet aussi de rester plus longtemps dans la tête du soumis. Il pensera à moi à chaque fois qu’il croisera une jeune femme dans le même style et ce n’est pas rien de surgir à l’improviste dans l’esprit de son soumis, c’est une forme de possession très intime. Tant que faire ce peut j’essaye d’apporter un soin tout particulier aux détails, je fais tout cela par passion non pour choquer. Il est évident que je ne peux me résoudre à adopter le rôle d’une jeune femme faible et fragile comme le voudrait la norme sociale. A moins bien sûr que j’en ai besoin pour piéger une proie ou pour humilier davantage un soumis. Se faire battre par une fillette et d’autant plus ridicule. C’est dommage que l’imaginaire collectif ne tolère au grand maximum que les féministes rebelles brassant de l’air, il ne laisse pas de de place pour les femmes maniant la cravache pour de vrai. Selon certain(e)s je serais une victime des fantasmes masculins, je ne ferais que me conformer à un rôle qu’ils me dictent. Je suis d’accord que c’est le cas pour les femmes dominant à demie-nue mais ce n’est pas ce que je fais. Quand un homme domine une femme, façon 50 Shades of Grey, le grand public trouve ça sexy et intriguant, presque normal en tout cas tendance. Quand c’est une femme qui prend le pouvoir c’est scandaleux. Du puritanisme à géométrie variable. Je ne me fais pas de soucis tout viendra en son temps. Remettre en cause un certain ordre de la société ne va pas se faire du jour au lendemain, il faut être réaliste. Pour en revenir à l’idée de départ, croyez-moi sur parole les hommes ne m’imposent rien et j’y trouve mon compte.
En jetant un chemisier recalé sur le lit je suis dit que j’avais bien de la chance de ne pas avoir à tout repasser et re-ranger. Mon soumis à demeure vit très bien le fait de se voir attribuer ces corvées-là. Tout le monde est content, je n’ai pas à faire attention au désordre que je peux mettre et il est heureux de passer derrière en se rendant utile. C’est dommage pour les autres femmes, beaucoup rêvent d’avoir un larbin pour les décharger de leurs corvées, ignorant que certains hommes seraient plus que volontaires pour les soulager. J’étais plutôt satisfaite de mon choix vestimentaire. J’ai ouvert la boite où je range mes bijoux, j’en ai sorti une paire de boucles d’oreilles et un collier. Il ne faut pas sous-estimer l’effet des accessoires sur les soumis. Un pendentif peut avoir un côté hypnotisant. Un soumis a souvent du mal à nous regarder dans les yeux, lui proposer un autre point de focalisation peut le soulager. Je me suis arrêtée un instant, une de mes brosses à cheveux était posée sur la commode. Une de celles dont je me sers pour administrer des fessées en travers de mes genoux. Je ne sais pas pourquoi mais elle m’attirait. J’avais envie de la prendre en main, machinalement j’ai effleuré son dos. Je ne sais pas vraiment si c’était l’envie de l’administrer ou de la recevoir, l’envie de puissance ou l’expiation d’un sentiment de culpabilité. Il y a beaucoup de pensées contradictoires dans ma tête. La séance du jour allait me faire du bien, je n’aurai pas dû mettre un frein à mes désirs pendant mes révisions. J’étais quelque peu en transe. En reprenant mes esprits j’ai claqué des doigts en direction de mon esclave domestique.
– Vas me chercher des talons qui vont bien avec ça.
– Bien, merci maitresse.
Ce qu’il y a de bien avec les fétichistes c’est qu’ils sont doués pour trouver les paires de chaussures s’accordant le mieux avec la situation. Enfin la plupart, comme le dit l’expression « les goûts et les couleurs …».Vous pouvez peut-être penser que je l’exploite mais il a vécu cet ordre comme une récompense. Un fétichiste aime avoir en main des escarpins et je fais en sorte de le lui permettre que très rarement pour en augmenter l’intensité. J’ai eu une dernière hésitation : collants opaques ou transparents ? J’ai opté pour le deuxième, il faut savoir suivre son instinct. J’ai tourné sur moi-même pour me regarder sous tous les angles pendant que mon esclave revenait avec différents choix de talons. Le jeune homme que j’allais voir dans quelques minutes était un débutant, difficile d’anticiper ce qu’il préférerait. Je n’aime pas les novices, ils sont bien gentils mais ils ne savent pas ce qu’ils veulent, ils avancent, ils reculent lorsqu’ils se rendent compte qu’ils ont vu trop grand. J’ai des fantasmes moi aussi, j’aime avoir le contrôle de la situation et les débutants ont tendance à me reprendre ce pouvoir lorsqu’ils prennent peur. C’est désagréable et cela me frustre, ce n’était pas le jour pour jouer avec nerfs. Je préfère m’amuser avec des personnes qui savent ce qu’elles veulent et qui sont fixées sur leurs envies et leurs limites. Il est rare que j’accepte des débutants mais dans le cadre d’une soirée de parrainage j’avais consenti à la charge de l’introduire dans le monde du BDSM. J’avais accepté au départ en trainant les pieds, j’avais cédé par reconnaissance envers des personnes qui m’avaient elles-mêmes guidé lors de mes premiers pas. Désormais j’étais excitée comme une puce, j’avais pleins d’idées en tête, j’allais avoir un soumis vierge de toute impression à modeler comme je le voulais. J’ai attrapé le carnet qui me sert à noter mes idées et mes scénarios. À la page du séquencier du jour j’avais intercalé l’impression annotée des emails que nous avions échangés. Parmi les différentes options qui m’étaient proposées je ne sais pas ce qui m’avais fait pencher pour lui, appelez ça l’instinct ou le coup de cœur. Il était loin d’être parfait. Il avait cette arrogance des débutants qui pensent être les meilleurs soumis ayant jamais existé. Ils n’ont pas encore pris leur premier coup de cravache mais nous assurent qu’ils sont endurant et qu’ils n’ont presque pas de limites. Sur ce point j’avais la ferme intention de le mater assez rapidement. Il allait vite craindre mes colères quoi qu’il en dise. Je trouvais ça presque attachant cette façon de vouloir se donner sans savoir à quoi il s’exposait. Un jeune étudiant modèle, du type qui a toujours fait ce que papa-maman attendait, un manque certain d’indépendance. Quelqu’un de motivé mais qui passait à côté de beaucoup de choses de la vie. Un soumis ayant conscience de son potentiel, un peu prétentieux mais c’est un autre point que j’avais l’intention de rectifier. J’estimais qu’avec une motivation adéquate il serait capable de faire de grandes choses. Une sorte de matière brute que j’allais pouvoir modeler à ma guise. Vous pouvez trouver ce petit introverti banal mais il m’avait séduite. Je me voyais prendre du plaisir à le faire progresser. Ne croyez pas cependant que j’allais être maternelle avec lui, j’étais et je suis toujours une psychopathe patentée. S’il avait oublié ce que cela faisait de pleurer il allait vite s’en rappeler. Encore une fois il ne faut pas se méprendre sur mes intentions, j’avais du respect pour lui. Nous sommes d’une génération de paresseux accro aux plaisirs faciles et immédiats, voire mêmes aux plaisirs désincarnés, virtuels. Tout ce que n’est pas le BDSM. Il faut un sacré cran pour oser sauter le pas. Il recherchait du challenge, à s’épanouir dans la difficulté. À ce titre il avait toute ma considération pour essayer. Surtout que je ne me souviens pas vous avoir donné une des prémisses de la relation, tout cela était dans le cadre d’une soirée de parrainage. Autrement dit sa première expérience serait dans un cadre public (initié il va s’en dire), loin de l’intimité et du confort d’une relation à deux. Je pense que c’était davantage de l’inconscience que du courage mais j’appréciais son effort. C’était peut-être parce qu’il me ressemblait, en miroir, moi aussi j’ai eu ma phase où je bravadais un peu. Je me souviens de mes débuts, mon angoisse face à ce monde nouveau, mon manque de repères et ces personnes qui m’ont aidé. J’ai refermé mon carnet, j’allais bien m’occuper de lui ne vous en inquiétez pas.